Friday, December 16, 2005

TRISTE NOEL ! TRISTE HAITI !

J’enrage ! A une semaine de Noël, on espérait commencer à entendre de bonnes nouvelles sur la préparation du scrutin. On attendait que des programmes politiques précis et des débats sur ces programmes occupent enfin le devant de la scène. On rêvait que les forces de progrès, les mouvements démocratiques finissent par s’emparer d’Internet et donnent à l’opinion internationale une autre vision du pays que ces sempiternelles propagandes lavalassiennes sur l’ex-« président démocratiquement élu ». Rien de tout cela. Bien au contraire, sous le sapin de la vie politique de Port-au-Prince: des émeutes pour attaquer le président du pays voisin, des « étudiants » qui agressent la ministre de la santé. Pauvre culture politique haïtienne, faite de démonstrations de force mâle, dérisoires gesticulations braillardes d’inconséquents bravaches.

La politique haïtienne semble ne pas pouvoir s’élever au-dessus du niveau des pires supporters de football. On braille, on casse, on ne réfléchit pas. Au mieux on s’indigne. Ce que l’alcool provoque chez les hooligans anglais, je crains que la bêtise ne l’explique pour les manifestants haïtiens. Que n’aviez-vous le même courage pour protester contre les gangs et leurs continuelles exactions ? Vous avez beau jeu de dénoncer le gouvernement d’un pays où sont maltraités vos compatriotes. Que faites-vous contre ceux, vos voisins de quartier, pas ceux d’un autre pays, qui font pire encore sur notre propre sol natal ?

J’enrage, mais la rage n’est jamais bonne conseillère. Au temps de la réflexion, deux hypothèses seulement peuvent être avancées pour comprendre le sens de ces manifestations, toutes les deux inclinant malheureusement au pessimisme.

La première hypothèse, c’est que ces manifestations étaient, au moins en partie, animées par un sentiment sincère. On maltraite en Dominicanie mes frères, mes cousins, et la visite du dirigeant d’un pays qui humilie mes proches m’est insupportable. Aussi vais-je demain tenter d’empêcher cette visite provocatrice. Je suis donc sincère, mais avant tout stupide. Quel résultat puis-je espérer d’une telle action ? Vraiment est-ce que je crois que, du coup, les Haïtiens seront mieux traités par une telle démonstration violente ? N’est-il pas venu à mon esprit que cela pourrait être l’inverse ? Ais-je demandé leur avis à mes frères qui sont là-bas ? N’ais-je vraiment d’autre chose à faire, moi « étudiant », que cette démonstration désespérée, contre-productive, primaire et dérisoire ?

Mais il y a évidemment une seconde hypothèse, pire encore que celle d’un mouvement stupide mais sincère. C’est celle de la manipulation. Ceux qui sont visés par ces démonstrations ne seraient pas alors les dirigeants dominicains, mais l’actuel gouvernement haïtien. Les manifestants ne savent pas qu’ils n’ont aucune chance d’infléchir l’attitude des Dominicains, mais ceux qui les jettent dans la rue sont plus fins politiques, ils veulent montrer que le gouvernement de transition ne tient rien, ne sert à rien, hormis à se répandre en excuses.

Une question que devraient se poser ces manipulés qui n'ont d'étudiants que le nom : sous le gouvernement d’Aristide, ou de Préval, les Haïtiens étaient-ils bien traités en République Dominicaine ? Bien sûr que non. Voyait-on alors manifester les mêmes King Kong de barricades devant l’ambassade du pays voisin, ou devant le Palais national?

Pendant ce temps, aux Etats-Unis, on publiait les premiers sondages sur les futures élections. Le Miami Herald en présentait un mercredi, financé semble-t-il par des proches de Siméus, qui, ô surprise, montrait que ce dernier, bien qu’invalidé, serait en tête des intentions de vote, devançant René Préval. Un autre sondage Gallup, plaçait lui aussi Préval en très bonne position pour être élu.

Tout va très bien Mme la Marquise ?

Margaret Cartier
Paris,
matinales@magdotcom.net

Ce texte parait dans le Matin d'Haiti, édition du vendredi 16 décembre 2005

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