Tuesday, November 29, 2005

LES VRAIES RAISONS DU REPORT DES ELECTIONS ?

Je sais que je vais décevoir le lecteur : je n’ai pas la réponse à cette question, mais il me semble nécessaire de la poser. En effet, la communauté internationale, je veux dire l’ONU, les autorités américaines, canadiennes, européennes, se la posent et un silence assourdissant leur répond.

Commençons par la version optimiste : ce retard est dû à des causes techniques. L’installation de bureaux de vote conformes aux normes internationales est une tâche difficile, surtout dans les endroits où l’insécurité règne. La fabrication, puis la distribution des cartes d’électeurs n’est pas non plus une tâche facile, surtout dans un pays qui n’arrivait pas, il y a dix ans, à distribuer des licences de conduite automobile.

L’élaboration d’une liste de candidats a soulevé des problèmes de constitutionnalité qui ne se posaient évidemment pas quand la liste était dressée dans l’arbitraire et les petits arrangements secrets, et évidemment encore moins quand il n’y avait pas de candidats du tout.

La mise en route de l’activité de partis politiques, mêmes aidés par des fonds internationaux, n’est pas non plus une affaire qui se règle en quelques jours. Bref, le CEP veut faire les choses bien, et on ne saurait l’en blâmer. Les mêmes autorités internationales qui aujourd’hui s’impatientent seraient les premières à dénoncer la légèreté des responsables du processus électoral si de graves dysfonctionnements se produisaient le jour des élections.

Parfois certaines critiques sont discutables et révèlent qu’il est à la mode de taper sur le CEP: Judie Joe C. Marie Roy, seule femme candidate ce qui la rend a priori sympathique à mes yeux, se plaint cependant qu’il n’y ait que 809 bureaux de vote, alors que lors des élections de 1990 il y en aurait eu 23000 ; ce qui fait, dit-elle, que les paysans devront marcher de longues heures pour voter.

Mais Judie Roy oublie que le chiffre de 809 est celui des « centres » de vote (là où seront décomptés les bulletins), alors que les "bureaux" de vote proprement dits (là où on dépose son bulletin) seront, en théorie, au nombre de 8800. Rapportés au nombre de votants potentiels, cela fait environ 360 votants par bureaux. A titre d’exemple, en France, le ministère de l’intérieur recommande qu’un bureau de vote corresponde à environ 1000 électeurs inscrits.

Il y a cependant une version pessimiste. En fait, il y en a même plusieurs. Selon certains, les membres du CEP, qui ne sont pas neutres, individuellement, et sont divisés. De là à penser que certains n’ont pas totalement envie que ça se passe bien, il y a un pas que je ne franchirais pas, faute d’éléments de preuve, mais la façon dont les événements se déroulent instille le doute.

Sentent-ils que le ou les partis qui ont leur préférence ne sont pas prêts ? Pensent-ils qu’ils vont perdre ces élections, et qu’alors le trouble sur la régularité du scrutin est un bon investissement pour le futur ? Faut-il faire d’autres hypothèses encore ? Je ne le sais pas. L’opinion internationale non plus.

Mais une communication claire et précise, fondée sur des faits vérifiables, sur les raisons exactes des reports des dates des élections est aujourd’hui urgente. Je ne vois pas d’ailleurs pourquoi elle n’a pas déjà eu lieu.

Margaret Cartier
Paris, le 23 novembre 2005

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